Qu'est-ce que la clause de la non-concurrence dans un contrat de travail ?

15/10/2015

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La clause de non-concurrence est une clause par laquelle l'employeur interdit à son salarié de travailler pour une entreprise concurrente ou d'exercer lui-même une activité concurrente, s'il quitte l'entreprise, sous certaines conditions, notamment de durée.

Quelle est l'utilité de la clause de non-concurrence ?

C'est en raison de son objet que la clause de non-concurrence est si réglementée. Elle a en effet pour but d'interdire au salarié, après la rupture de son contrat de travail :

  • d'exercer, sous quelque forme que ce soit, une activité concurrente de celle de son ancienne entreprise. Ainsi, le salarié ne peut pas exercer, dans une entreprise concurrente, des fonctions de même nature que celles qui lui étaient interdites, peu importe leur dénomination ;
  • de se faire embaucher, directement ou indirectement (par intérim par exemple), dans une entreprise concurrente de celle de son précédent employeur.

Quelles sont les règles de fond et de forme à respecter ?

La validité de la clause de non-concurrence est liée au respect de règles concernant tant à sa rédaction que de son contenu. Ainsi, pour être licite, la clause doit répondre à plusieurs conditions et fixer une contrepartie financière.

1. La clause de non-concurrence doit être limitée dans le temps et l'espace

L'interdiction qu'elle contient doit être adaptée afin de ne pas empêcher l'ancien salarié de retrouver du travail dans le domaine d'activité qui est le sien. Ainsi, l'interdiction sera limitée dans le temps (généralement un maximum de 2 ans) et dans l'espace (territoire géographique précis, le plus limité possible).

Pensez à consulter votre convention collective qui peut prévoir des dispositions précises sur les modalités relatives à la durée de l'indemnité.

La notion d'espace peut paraître délicate quand on parle de délocalisation, mondialisation, etc. En pratique, il faut veiller à respecter l'objet et l'esprit de la clause de non-concurrence et, en tout état de cause, ne pas porter une atteinte non nécessaire à la liberté du travail.

Si une clause n'est pas limitée dans le temps et dans l'espace, elle est nulle et cause un préjudice au salarié qu'il convient de réparer.

En revanche, si l'un des deux facteurs apparaît comme trop contraignant (par exemple sur l'ensemble du territoire européen, obligeant le salarié qui veut continuer à travailler à s'expatrier), le juge peut estimer que l'atteinte ainsi imposée au salarié dans sa liberté de travailler est trop importante. Cela conduit généralement soit à une restriction de la clause, soit à son annulation pure et simple.

À l'inverse, une clause de non-concurrence prévue par le contrat de travail d'un salarié travaillant en Corse et étendue à toute l'île pendant 1 an est considérée comme valide.

2. La clause de non-concurrence doit être justifiée par les intérêts légitimes de l'employeur

Tous les salariés n'ont pas systématiquement une clause de non-concurrence dans leur contrat. Seuls les postes importants, stratégiques, très spécialisés et ceux où le salarié peut être confronté à des données confidentielles sont susceptibles de se voir appliquer une telle clause.

En d'autres termes, l'interdiction doit être justifiée par l'existence d'un intérêt, pour employeur, qui devra être légitime et démontrable. Ainsi, dans la rédaction de la clause de non-concurrence, il faudra impérativement, en introduction, expliquer pourquoi le salarié est soumis à une telle clause.

3. La clause de non-concurrence doit comporter une contrepartie financière

Le préjudice subi par le salarié (du fait de la restriction à la liberté de travail découlant d'une clause de non-concurrence) doit être indemnisé sous la forme d'une contrepartie financière suffisante. Cette obligation doit impérativement être respectée : dans le cas contraire, le salarié peut travailler pour une société concurrente et même demander des dommage-intérêts à son ancien employeur.

Cette contrepartie doit donc être proportionnelle au préjudice subi quant à sa durée et aux revenus antérieurs du salarié.

Elle ne peut être versée qu'à l'issue du contrat de travail, selon des modalités définies en accord avec le salarié (versement unique, mensuel, etc.). Cependant, un délai entre le départ du salarié, suite à sa dispense de préavis et la décision de l'employeur de ne pas verser cette contrepartie, ne libère pas le salarié de son obligation vis-à-vis de ce dernier. En outre, lorsque la clause est levée après le départ effectif du salarié de l'entreprise, la contrepartie financière reste due. Enfin, la renonciation par l'employeur au bénéfice de cette clause ne peut pas intervenir au cours de l'exécution du contrat. Elle doit être faite au moment du départ effectif du salarié.

Elle ne peut pas être versée en intégralité à la fin de l'application de la clause.

Cette indemnité est assimilée à un salaire, elle est donc :

  • assujettie aux cotisations salariales et patronales de Sécurité sociale ;
  • soumise à l'impôt sur le revenu ;
  • prise en compte pour le calcul de l'indemnité de congés payés.

4. La clause de non-concurrence ne doit pas prévoir le versement d'une indemnité avant la rupture du contrat de travail

Si elle le prévoit, elle est déclarée nulle et vous ne pouvez pas obtenir le remboursement des sommes versées.

Que faire en cas de démission ?

En cas de démission du salarié, la contrepartie financière reste due et ne peut être minorée. Toute mention contraire au contrat de travail est réputée non écrite (Cass. soc., 25 janvier 2012, n° 10-11590).

Ainsi, quelle que soit la cause de départ du salarié de l'entreprise, la contrepartie prévue par la clause de non-concurrence est identique (Cass. soc., 20 février 2013, n° 11-17.941).

Quelles sont les obligations conventionnelles à connaître ?

En matière de non-concurrence, il faut tenir compte des différentes obligations légales et conventionnelles applicables.

Tout d'abord, la clause de non-concurrence doit reprendre l'ensemble des éléments obligatoires énoncés plus haut, sous peine de nullité. Il faut également vous référer à votre convention collective qui peut fixer des dispositions particulières de validité supplémentaires, telles que des restrictions de temps, des contreparties financières bien précises, les conditions de levée de la clause, etc.

Votre convention peut être ancienne et ne pas intégrer tous les critères obligatoires définis plus haut. De même, elle peut prévoir une contrepartie financière insuffisante (même si cela reste soumis à l'appréciation des juges en cas de contentieux). Ne vous limitez donc pas au texte de votre convention pour rédiger la clause et assurez-vous qu'elle est complète et appropriée !

Comment bien rédiger la clause de non-concurrence ?

Il est important, en plus des dispositions obligatoires, que la clause de non-concurrence, signée souvent au début de la collaboration, précise :

  • la date d'application : en pratique, elle n'est applicable qu'à l'issue de la collaboration. Il faut cependant mentionner dans le contrat si vous souhaitez qu'elle soit applicable ou non en cas de rupture pendant la période d'essai. Généralement, on évite de le faire pour ne pas indemniser pendant plusieurs mois un salarié qui ne serait resté que quelques jours ou semaines. Si l'employeur souhaite exercer sa faculté de renonciation, il doit le faire en même temps qu'il notifie la rupture de la période d'essai. Cette renonciation doit être donnée expressément et doit être claire et non équivoque ;
  • les conditions de levée de la clause : la clause doit prévoir de pouvoir être levée (généralement par un écrit de l'employeur envoyé en recommandé avec accusé de réception pendant le préavis). Plusieurs raisons peuvent conduire l'employeur à la levée de la clause :

- parce que, selon lui, le salarié n'est pas assez performant pour nuire à l'entreprise,

- parce que l'entreprise n'a pas les moyens de financer cette interdiction,

- parce qu'il est informé que le salarié quitte l'entreprise pour aller dans un domaine d'activité totalement différent, sans risque pour l'entreprise ;

  • les conséquences en cas de violation par le salarié de l'interdiction qui lui est faite, avec notamment arrêt du versement de la contrepartie financière et indemnisation de l'employeur.

Certains employeurs optent pour insérer dans la clause de non-concurrence une clause pénale fixant par avance le montant de l'indemnisation que devra leur verser le salarié en réparation du préjudice subi par l'entreprise du fait de la violation de la clause. À noter toutefois que le juge est libre d'en réviser le montant s'il l'estime excessif ou dérisoire par rapport au préjudice réellement subi.

Par contre, dans l'hypothèse d'un contentieux relatif au montant de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, le juge n'a pas le pouvoir d'augmenter ou de diminuer son montant. Si le montant de la contrepartie financière est jugé insuffisant, la clause sera nulle.

La clause de non-concurrence peut être insérée dans le contrat de travail initial, mais elle peut aussi être prévue, après la rupture de ce contrat, dans une transaction signée entre l'employeur et le salarié.

Dans ce cas, la transaction doit être rédigée de façon très explicite et préciser clairement quelle contrepartie financière est accordée au salarié au titre de la clause de non-concurrence.

Lorsque le salarié concerné est associé ou actionnaire, la clause peut être prévue dans un pacte d'actionnaire mais doit toujours comporter une contrepartie financière. Si elle est absente ou dérisoire, la clause est déclarée nulle.

Quelques conseils

1. Assurez-vous de l'opportunité de la clause de non-concurrence

Avez-vous vraiment un intérêt à l'application de cette clause qui va vous coûter de l'argent (indemnité de non-concurrence) et qui ne vous protège qu'imparfaitement (il faut prouver la concurrence, ce qui n'est pas évident) ?

Il convient également d'être prudent. Certains salariés n'hésitent pas à se faire embaucher quelques jours dans une activité non concurrente, demandant alors à l'employeur de lever l'application de la clause de non-concurrence, ce qu'il s'empresse de faire pour éviter de payer la contrepartie financière. Puis, quelques jours après, le salarié démissionne et se fait embaucher chez votre principal concurrent, n'étant plus soumis à la clause. Il s'agit certes d'une fraude, mais qui devient fréquente et qui reste difficile à démontrer.

Optez pour un versement mensuel de la contrepartie financière, vous aurez ainsi la possibilité de suspendre les versements en cas de non-respect de la clause par le salarié.

2. N'oubliez pas que le fait pour le salarié de solliciter un emploi au sein d'une entreprise concurrente ne caractérise pas à lui seul une violation de la clause de non-concurrence

Le salarié qui entreprend avant et après la rupture de son contrat de travail des recherches d'emploi ne viole pas la clause de non-concurrence. En effet, la clause ne s'applique qu'après la rupture du contrat de travail. Pour qu'il y ait violation, des actes de concurrence doivent être matérialisés.

3. N'oubliez pas que le salarié doit être informé, s'il est tenu par la clause, au plus tard à la date effective de son départ de l'entreprise

Au moment de la rupture du contrat de travail de votre salarié, avec dispense d'exécution du préavis, vous devez savoir que la date du départ effectif de l'entreprise fixe la date à partir de laquelle il est tenu de respecter l'obligation de non-concurrence, la date d'exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité.

Mais attention, la cessation d'activité ultérieure de l'employeur n'a pas pour effet de décharger le salarié de son obligation de non-concurrence.

4. Sachez que vous pouvez renoncer à la clause de non-concurrence dans la lettre de licenciement

Il vous est tout à fait possible de renoncer à la clause de non-concurrence dans la lettre de licenciement. Attention cependant à vérifier votre convention collective : si des dispositions particulières existent, vous devrez alors les respecter. La convention collective de l'immobilier prévoit un courrier recommandé adressé dans les 15 jours suivant l'envoi de la lettre de licenciement.

la possibilité de renonciation doit figurer dans le contrat de travail ou la convention collective, sinon vous ne pourrez pas imposer la renonciation au salarié.

Si vous dispensez le salarié de son préavis et que vous entendez renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, vous devez le lui faire savoir avant son départ effectif de l'entreprise. À défaut, vous pourrez être condamné à lui verser une somme au titre de l'indemnité spéciale de non-concurrence.

5. Sachez aussi que vous pouvez lever la clause de non-concurrence dans le contrat de travail

Vous pouvez mentionner dans le contrat de travail du salarié que vous renoncez à la clause de non-concurrence, par l'envoi au salarié d'une lettre recommandée avec accusé de réception dans un certain délai (15 jours par exemple) suivant la notification de la rupture. En cas de litige, vous produirez la preuve de cet envoi dans le délai prévu par la clause au contrat.

6. N'oubliez pas qu'à la fin de la période d'essai, le salarié a droit au paiement de l'indemnité de non-concurrence !

La clause de non-concurrence prévue dans le cas d'une résiliation du contrat de travail s'applique lorsque l'employeur met fin à la période d'essai. Son application ne peut être évincée que lorsque les parties au contrat en sont convenues de manière expresse et explicite.

Textes officiels

  • Cass. soc., 20 février 2013, n° 11-17.941 (seule une absence de contrepartie financière ou une contrepartie dérisoire peut provoquer la nullité de la clause de non-concurrence)
  • Cass. soc., 13 mars 2013, n° 11-21.150 (le salarié doit être informé, s'il est tenu par une clause de non-concurrence, au plus tard à la date du départ effectif de l'entreprise)
  • Cass. soc., 10 avril 2013, n° 12-12.717 (l'employeur ne peut être dispensé de verser la contrepartie financière que s'il libère le salarié de son obligation de non-concurrence au moment où il rompt le contrat de travail)
  • Cass. soc., 10 avril 2013, n° 11-25.619 (il n'y a pas violation de la clause de non-concurrence si le salarié se contente seulement de solliciter un emploi auprès d'une entreprise concurrente)
  • Cass. soc., 10 juill. 2013, n° 12-14.080 (levée de la clause de non-concurrence)
  • Cass. soc., 10 juill. 2013, n° 12-17.921 (le salarié a droit au versement de l'indemnité de non-concurrence à la fin de la période d'essai)
  • Cass. soc., 20 novembre 2013, n° 12-20.074 (le délai entre le départ du salarié et la décision de l'employeur de ne pas verser la contrepartie financière ne libère pas le salarié de son obligation)
  • Cass. soc., 15 janvier 2014, n° 12-19.472 (la clause de non-concurrence qui envisage le versement d'une indemnité avant la rupture du contrat de travail est nulle)
  • Cass. soc., 2 avril 2014, n° 12-29.693 (sans contrepartie financière, le salarié peut travailler pour une société concurrente et demander des dommage-intérêts à son ancien employeur)
  • Cass. soc., 12 juin 2014, n° 13-14.621 (démission et clause de non-concurrence)
  • Cass. soc., 2 juillet 2014, n° 12-27.285 (clause de non-concurrence nulle, réparation)
  • Cass. soc., 23 septembre 2014, n° 13-15.111 (extension de la portée dans le temps et montant de la contrepartie financière non fixée)
  • Cass. soc., 11 mars 2015, n° 13-22.257 (levée unilatéralement impossible au cours du contrat)
  • Cass. soc., 9 avril 2015, n° 13-25.847 (minoration par les parties de la contrepartie pécuniaire d'une clause de non-concurrence)
  • Cass. soc. 15 septembre 2015, n° 14-11.701 (lorsque la rupture du contrat résulte d'une convention entre l'employeur et le salarié, le délai de renonciation à la clause de non-concurrence court à compter de la date de rupture fixée dans la convention)
  • Cass. soc., 2 décembre 2015, n° 14-19.029 (la clause qui permet à l'employeur de renoncer à tout moment, avant ou pendant la période d'interdiction, aux obligations qu'elle fait peser sur le salarié est illicite)
  • Cass. soc., 31 mars 2016, n° 14-29.865 (validité d'une clause de non-concurrence étendue à l'ensemble de la Corse pour 1 an)
  • Cass, soc., 3 novembre 2016, n° 15-17.666 (en cas de dispense de préavis, le salarié doit être informé de la renonciation à la clause de non-concurrence avant son départ effectif de l'entreprise)

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