Comment déléguer une activité ou une responsabilité à son collaborateur ?

04/06/2017

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En tant que manager vous déplorez sans doute de passer une partie trop importante de votre temps sur des activités répétitives peu importantes, au détriment de tâches plus fondamentales. De plus, certains de vos collaborateurs perçoivent l'intérêt d'évoluer dans leur mission et leur responsabilité et vous savez que certaines de vos tâches pourraient leur être transmises.

Avant d'aller plus avant dans nos développements, il nous paraît souhaitable de préciser deux aspects de la délégation qui sont rarement clarifiés.

La délégation n'est pas une mission définitive

Il faut garder à l'esprit que lorsque vous déléguez une tâche à un collaborateur, celle-ci n'est pas définitive. En d'autres termes, elle reste extérieure à la mission de votre collaborateur. Ce point est important, notamment par le fait que lors de vos évaluations annuelles, il faudra ne pas oublier de le prendre en compte, et accepter des perturbations éventuelles dans les autres tâches propres à la mission du collaborateur.

La question de la rémunération

Par principe, une délégation ne conduit pas à une révision de la rémunération. C'est donc d'abord un intérêt qualitatif pour le collaborateur qui s'insère, par exemple, dans son développement de compétences. Si jamais il y a une remarque sur ce point par ce dernier, il est de votre rôle de le clarifier au plus vite.

En revanche, rien n'empêche d'apporter une « récompense » sous une forme quelconque. À vous de voir en fonction de vos process, mais cela aura bien entendu un impact important dans la motivation du collaborateur.

Voici les principales étapes à respecter pour réaliser une délégation efficace :

  • sélectionner les tâches à déléguer : distinguer ce qui peut être délégué de ce qui ne peut pas l'être ;

  • sélectionner les personnes à qui on délègue en fonction des objectifs et des compétences requises ;

  • établir les objectifs de la délégation et savoir les transmettre de façon motivante.

Méthodes et explication:

1. Sélectionner les tâches/activités à déléguer

Avant de se lancer dans une démarche de délégation, il est important de faire le point sur nos propres missions et activités afin de ne déléguer que ce qui doit l'être.

Il ne s'agit pas ici de vous faire redéfinir sous forme d'une description de poste l'ensemble de votre activité. En revanche il est nécessaire de faire ressortir ce qui la compose en priorité.

Qu'est-ce qu'une activité ? Il s'agit de toutes les tâches et responsabilités qui constituent notre quotidien. Cela peut autant toucher des tâches opérationnelles (exemple : produire le budget), qu'à des tâches de management (exemple : mener la réunion mensuelle).

Est-ce que toutes nos tâches peuvent être déléguées ? Cette première interrogation est importante car elle permet de souligner qu'il y a du « délégable » et du « non délégable ». Mauvaise nouvelle, toutes nos tâches, en tant que manager, ne peuvent pas être déléguées. La bonne nouvelle est que l'on peut déterminer celles qui le sont et celles qui ne le sont pas, ceci pour les raisons ci-dessous.

> Les tâches/activités qui ne peuvent pas être déléguées

Il existe trois types de tâches/activités qu'il faut éviter de déléguer :

1. Les tâches/activités qui appartiennent au coeur de notre mission

Par exemple, si vous avez la responsabilité d'un service marketing, décider des études de marché à lancer, est au coeur de votre mission. Il n'est pas possible de le confier à un collaborateur ou à un stagiaire !

En général se sont des tâches de décision qui engagent la stratégie ou l'existence de votre service à moyen ou long terme.

2. Les tâches/activités de management

Par exemple, il n'est pas sérieux de déléguer les entretiens individuels de vos collaborateurs directs, ou des tâches de répartition de charges qui impliquent directement la productivité du service ou de l'entreprise. Les activités de management doivent rester sous votre contrôle.

3. Les tâches/activités qui touchent à la représentation extérieure de votre service ou de votre entreprise

Par exemple il peut s'avérer impératif que certains clients grands comptes soient suivis par un directeur commercial, et non délégué à l'un de ses collaborateurs ou à un stagiaire.

Cette distinction demande quelques remarques complémentaires :

  • Bien que certaines activités ne doivent pas être déléguées, cela ne signifie pas qu'on ne puisse pas y associer des collaborateurs. Par exemple, pour reprendre notre exemple n° 3, un directeur commercial peut tout à fait associer un de ses commerciaux aux entretiens qu'il a avec des comptes clés, voire à lui demander un premier travail préparatoire. Notre propos est simplement de vous indiquer les limites de ce qui peut être délégué.

  • On parle souvent de « délégation de pouvoir ». Cette expression sort du cadre de cette fiche, car elle représente en fait une transmission de responsabilité. Quand on a la signature par « délégation de pouvoir » d'un document, on prend la responsabilité de celui qui a le pouvoir de signature, mais également les effets juridiques et peut-être pénaux qui s'y rattachent. C'est pourquoi à nos yeux, la responsabilité d'une signature appartient aux tâches qui ne se délèguent pas.

  • Il est important que le manager qui délègue apprécie de faire et sait parfaitement faire la tâche ou la responsabilité qu'il délègue. Nous soulignons ce critère car la tâche déléguée ne doit pas paraître aux yeux du collaborateur à qui on délègue comme la « dernière roue du carrosse » ou le rejet du manager. Nous reviendrons sur ce point dans la dernière étape consacrée à l'entretien de transmission de la délégation.

> Les tâches/activités qui peuvent être déléguées

En voici les critères :

  • Elles appartiennent à des domaines à faibles rendements ou à faibles conséquences. On trouve souvent ses activités parmi les activités opérationnelles routinières et plutôt fortement encadrées par des documents ou des procédures.

  • Toutes tâches/activités permettant au manager, en les déléguant, de réaliser d'autres tâches plus stratégiques ou d'améliorer la réalisation des tâches qu'il conserve.

  • Une tâche/activité dont le responsable est le seul à pouvoir ou savoir réaliser, mais qui l'empêche de s'absenter « en toute sécurité » et/ou qui provoque un « goulot d'étranglement » dans l'organisation du travail et dans les décisions.

2. Sélectionner les personnes à qui l'on peut déléguer

De même qu'il y a des tâches qui peuvent être déléguées et d'autres non, nous trouvons des collaborateurs pour qui la délégation est possible ou souhaitable et d'autres non.

Qualités d'un collaborateur à qui l'on peut déléguer

  • un collaborateur autonome. Par autonome, nous voulons parler d'un collaborateur qui maîtrise déjà parfaitement son propre domaine ou son poste. La délégation va ajouter de nouvelles actions à ses propres tâches, il faut donc qu'il soit déjà autonome. Cela ne signifie pas qu'il soit compétent dans la tâche que vous allez lui déléguer. Cet aspect est une question de préparation à la délégation et nous l'aborderons à la prochaine étape ;

  • un collaborateur qui montre sa volonté d'aller au-delà de son poste. Cette volonté s'observe parmi les collaborateurs qui prennent des initiatives, et qui tendent à dépasser le cadre spécifique de leur domaine de responsabilité. Également parmi ceux qui sont curieux, qui vous posent des questions, vous interrogent. Enfin, ceux plutôt tournés vers les autres membres de l'équipe, ceux qui aident ou conseillent les autres ;

  • un collaborateur pour lequel nous avons un objectif d'évolution. La délégation va alors avoir comme fonction de préparer l'évolution de la personne à qui on délègue, vers de nouvelles fonctions ou responsabilités, ou une nouvelle carrière.

Remarque : une des premières conséquences de ces critères est que le collaborateur à choisir fait partie des plus anciens dans le poste.

Qualités d'un collaborateur à qui nous allons éviter de déléguer

Au-delà du simple fait de prendre l'inverse des critères précédents on peut dénombrer deux critères spécifiques :

  • un collaborateur expérimenté mais ayant récemment évolué dans sa fonction ou changé de poste. La délégation risque d'ajouter une difficulté inutile à une situation déjà stressante pour le collaborateur ;

  • un collaborateur ayant récemment obtenu de mauvais résultats ou en contre-performance. Éviter que la délégation soit ressentie comme minimisant notre mécontentement.

3. Établir les objectifs de délégation et les transmettre de façon motivante

Comme tout acte de management, la délégation doit être formulée dans un objectif clairement exprimé. Nous abordons la manière d'établir un objectif dans la fiche « Formuler ses objectifs », mais pour en résumer les principes de base il est bon de suivre trois règles d'or :

Votre objectif doit être :

  • Basé sur une action observable et mesurable.

  • Assorti des moyens nécessaires.

  • Assorti de critères de mesure.

Pour cela, il sera souhaitable que le manager passe par l'autoréflexion suivante :

  • ai-je pensé à tous les outils qu'il doit utiliser ? Peut-il les obtenir ? Sait-il les utiliser ?

  • y a-t-il un conflit avec d'autres tâches ? Faut-il prioriser cette tâche ? Faut-il préciser à quel moment la faire ?

  • lui faut-il un soutien ? Si oui, sous quelle forme ?

Transmettre l'objectif de délégation signifie de conduire un entretien avec votre collaborateur à qui vous souhaitez déléguer.

Cette présentation orale est importante car elle permet de transmettre toute la motivation et l'intérêt d'une telle délégation.

Pour cela il est bon d'éviter deux pièges :

  • Éviter de trop parler et de ne pas permettre au collaborateur d'exprimer son point de vue. On pense trop souvent que la bonne manière d'expliquer ce que l'on veut est de le présenter de la manière la plus détaillée possible. Le résultat est souvent une incompréhension du collaborateur. Voire plus, si votre collaborateur ne pose aucune question, n'a aucun doute, dites-vous que c'est plutôt mauvais signe. Il faut garder à l'esprit que lorsque vous rencontrez votre collaborateur il n'est pas au même niveau de clarté que vous l'êtes et il est important de lui permettre d'y arriver. Or, il le fera par étapes, ou par questions et par remarques successives. Ce sont ces étapes qu'il faut respecter.

  • Éviter de couper court aux objections  du collaborateur. Si vous pensez que le collaborateur va (ou doit) accepter d'emblée votre proposition de délégation, vous commettez une dangereuse erreur. Il est normal que le collaborateur « n'achète » pas la délégation au premier regard, mais vous pose des questions ou souhaite des précisions. Cela signifie qu'il est acceptable que le collaborateur à qui on souhaite déléguer une tâche, puisse apporter quelques modifications ou touches personnelles si jamais elles sont nécessaires.

Si ces modifications sont trop importantes ou remettent en question l'atteinte de l'objectif, alors il faudra :

  • D'abord en discuter, et c'est tout l'objet de l'entretien.

  • Ensuite si nous n'arrivons pas à un compromis, il faut envisager de confier la tâche à une autre personne.

Sur quoi le collaborateur peut-il apporter utilement des modifications ?

  • afin que la délégation soit compatible avec ses autres tâches ;

  • afin d'améliorer la qualité du travail demandé : apporter plus de précisions, revoir les critères de résultats, etc.

Au contraire si l'on arrive à l'entretien avec l'idée que l'objectif c'est celui-là et rien d'autre, alors il faut s'attendre à trois conséquences négatives possibles :

  • le collaborateur transformera sa contribution en opposition, sans chercher un compromis utile à tous ;

  • le collaborateur se taira, mais fera tout pour bâcler la tâche déléguée ;

  • le collaborateur sur-dimensionnera l'énergie et le temps passé sur la tâche déléguée, au détriment de ses autres tâches (au détriment également des résultats du service).

Si votre collaborateur exprime des objections, faites l'effort d'en comprendre les causes. La plupart du temps elles sont bénéfiques à l'atteinte finale de l'objectif.

Quelques conseils

1. Ne pas considérer que s'il y a échec c'est de la responsabilité du collaborateur

Lorsque l'on délègue c'est toujours nous, en tant que manager, qui gardons la responsabilité des résultats obtenus, ou des échecs. La délégation d'une de nos taches ne signifie pas que l'on transmet au collaborateur notre niveau de responsabilité. Il est toujours présent et si le collaborateur ne réussit pas la tâche déléguée nous devons en assumer les conséquences.

Trop souvent la délégation est soit considérée par le collaborateur comme une punition, soit est refusée car dans le passé elle a donné lieu à un transfert de responsabilité anormale.

2. Ne pas établir des contrôles inopinés

La délégation a un caractère anxiogène, et certains d'entre nous peuvent souhaiter s'assurer doublement que la tâche déléguée se déroule correctement en réalisant des contrôles sans prévenir.

Cette attitude est très mauvaise pour deux raisons. D'une part elle remet en question les engagements que vous avez dû exprimer durant la transmission de votre objectif, en termes de moment de contrôle et de mesure.

Réaliser une vérification en dehors de cette décision revient à remettre en cause la parole donnée et la sincérité de votre délégation. Le collaborateur peut se sentir « fliqué ».

D'autre part, nous sommes très souvent déçus de cette action, pour la raison suivante. Lorsque nous déléguons une tâche nous connaissons toutes ses étapes et notamment les moments délicats. Or, il devient naturel de vouloir réaliser notre contrôle juste à ce moment-là. C'est justement à ces mêmes moments que notre collaborateur risque d'avoir quelques difficultés, d'hésiter, ou de recommencer ce qu'il a fait. Bref, de ne pas être aussi « compétent » et « expert » que nous-mêmes, et de faire les efforts nécessaires pour y arriver. Nous aurons alors du mal à ne pas montrer notre mécontentement ou notre agacement, et l'impact sera très souvent négatif pour le collaborateur. La plupart du temps il sait que vous feriez mieux, mais si vous aviez respecté les moments de contrôle établis ensemble, alors ses doutes et ses recommencements n'auraient pas été visibles. Cela aurait conduit à un sentiment positif d'avoir été à la hauteur.


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